Avec l’arrêt de la persécution des chrétiens il a su donner un nouvel essor à l’empire romain
La persécution des Chrétiens est-elle à l’origine du déclin de l’empire romain gouverné par des empereurs dits « décadents » qui priorisaient les plaisirs, les jeux du cirque mettant en œuvre la mise à mort de milliers de chrétiens. Le règne de Constantin Ier et l’essor donné à l’Empire romain sous sa gouvernance peut laisser entrevoir cette hypothèse.
Buste colossal de Constantin Ier, bronze du IVe siècle, musées du Capitole.
(Image : Wikimedia / Capitoline Museums / Domaine public)
Né dans un empire romain affaibli et rongé par la persécution des chrétiens, Flavius Valerius Aurelius Constantinus, qui deviendra par la suite l’empereur Constantin Ier (272 ou 280 -337), était un guerrier, fin stratège, et un homme de tolérance. Il a contribué à unifier l’Empire Romain en lui redonnant son lustre d’antan tout en devenant le premier empereur chrétien. Innovant, réformateur et bâtisseur, il a participé à la mise en place des fondements de la culture chrétienne.
Un guerrier devient l’empereur d’un Empire romain réunifié
Flavius Valerius Aurelius Constantinus est né à Naissus en Mesie (aujourd’hui Niš en Serbie). Dans un empire romain gouverné par un système de tétrarchie, un gouvernement à quatre têtes : deux Augustes ou « empereurs principaux » qui se partagaient la partie orientale de l’Empire romain dont la capitale était Nicomédie et la partie occidentale de l’empire dont la capitale était Milan. À cela se rajoutaient deux césars ou « empereurs auxiliaires » qui gouvernaient pour l’un l’Espagne, la Bretagne et la Gaule avec pour capitale Trèves et pour le second l’Illyrie, qui correspond aujourd’hui à la Slovénie, le sud de la Croatie, la Bosnie-Herzégovine, le Monténégro, l’Albanie et le Kosovo avec pour capitale Sirmium (aujourd’hui Sremska Mitrovica en Serbie). Ce système avait été mis en place par Dioclétien, dans un Empire romain marqué par la persécution des premiers chrétiens.
Le père de Constantin, Constance Chlore, était le César qui gouvernait l’Espagne, la Bretagne (actuelle Grande Bretagne) et la Gaule. En 305, après la démission des deux Augustes, il est devenu à son tour Auguste. À sa mort en 306, Constantin a été proclamé Auguste par les légions de Bretagne.
C’est ainsi qu’a débuté la vie de Constantin, premier empereur à devenir chrétien, mais 34e empereur romain : au sein d’un chaos construit sur la lutte pour la nomination des Augustes selon le mode du mérite ou de la descendance. L’empire Romain ira jusqu’à 7 Augustes avant que ne triomphent Constantin et Licinius. Ils ont gouverné l’Empire selon le principe d’une dyarchie : un Auguste pour la partie Occidentale de l’empire et un autre pour la partie orientale. La dyarchie va prendre fin en 324.
Représentation du Songe de Constantin Ier et de la bataille du pont de Milvius,
illustration des Homélies de Grégoire de Nazianze 879-882, Bibliothèque nationale de France
(Ms grec 510). (Image : Wikimedia / Bibliothèque nationale de France / Domaine public)
Deux éléments ont contribué à conduire Constantin vers l’unité de l’empire. Le premier élément a été la bataille du pont de Milvius en 312, au cours de laquelle il a été déclaré vainqueur grâce à une vision, avant la bataille : celle de la croix et d’un chrisme, symbole construit à partir des lettres grecques Chi et Rho (XP) qui représenteraient les premières lettres du mot Christ, et d’un message Εν Τουτω Νικα, soit en latin In hoc (signo) vinces : « Par ceci (signe) tu vaincras ».
La présence fréquente de l’alpha et de l’oméga de part et d’autre du chrisme renforçait son caractère sacré, divin et éternel. L’alpha et l’oméga symbolisaient le début et la fin, ou encore la naissance du monde et son caractère infini, en d’autres termes, Dieu. Le chrisme serait donc la porte d’accès à Dieu.
La bataille du pont de Milvius en 312, qui verra la victoire de Constantin Ier grâce à sa vision, avant la bataille : celle de la croix et d’un chrisme. (Image : Wikimedia / Giulio Romano / Domaine public)
Constantin a décidé d’apposer ce symbole sur les boucliers de tous ses soldats et a remporté la victoire : suite à ses talents de guerrier, mais aussi à une série de coïncidences, dont la noyade d’un Auguste, une armée inférieure en nombre allait remporter cette première victoire décisive. Cette vision a été décrite par l’historien et archevêque de Césarée, Eusèbe de Césarée. Ce symbole sera repris par le monde chrétien jusqu’au Ve siècle où il sera remplacé par la croix. Le second élément a été la défaite de Licinius, à la suite de cela, Constantin Ier allait devenir l’empereur de tous les Romains d’Occident et d’Orient.
Le premier grand empereur romain chrétien
Un père rude guerrier, monothéiste et tolérant vis à vis de la religion chrétienne, une mère, répudiée, d’origine modeste et proche de la religion chrétienne, mais aussi des visions et une approche stratégique due à bonne lisibilité de la société, allaient permettre à Constantin de comprendre l’urgence de l’arrêt de la persécution des chrétiens, et de l’importance qu’il y avait à accompagner le développement de cette croyance au sein de l’empire romain.
Par ailleurs, il avait aussi remarqué le dynamisme des villes majoritairement chrétiennes. Les trois étapes conduisant au développement de cette croyance ont jalonné l’ascension de Constantin vers son rôle d’empereur absolu de l’empire romain réunifié. Sa mère lui a permis de consolider la culture chrétienne.
La première étape se situe le 30 avril 311 avec l’Édit impérial de Sardique, aussi appelé l’Édit de Galère, promulgué au nom de trois empereurs : Constantin, Licinius et Maximium. Il met fin à la persécution de 303 à 311, lancée par l’empereur Dioclétien. Les chrétiens emprisonnés seront libérés, faisant du christianisme une religion licite.
La seconde étape est intervenue en 313, après l’accord de partage de l’empire par Constantin et Licinius. C’est l’Édit de Tolérance ou Édit de Milan qui a placé la religion chrétienne au même niveau que les autres religions et a autorisé une restitution complète des biens confisqués à l’église chrétienne : une manière d’effacer complètement les persécutions qui avaient été menées les années précédentes.
L’empereur Constantin (au centre), avec les évêques du concile de Nicée,
tenant anachroniquement le texte du « symbole de Nicée-Constantinople »
dans sa forme liturgique grecque. (Image : Wikimedia / Domaine public)
La troisième étape s’est déroulée juste après la défaite de Licinius, en 324 avec le Concile œcuménique de Nicée qui s’est déroulé du 20 mai au 25 juillet 325. Tout en ayant l’objectif de réduire les divisions au sein du monde chrétien, miné par divers courants, ce concile a marqué par la place occupée par l’empereur, non-baptisé, qui de fait est devenu l’arbitre, voire le décideur : les pouvoirs politiques et religieux sont alors devenus indissociables, le terme de césaropapisme a désigné cet état. Ce Concile a marqué profondément la culture chrétienne par les décisions qui ont été actées, notamment par exemple le choix de la fête de Pâques.
La mère de Constantin, Hélène, avait été reconnue impératrice par son fils, elle a joué un rôle important dans les fondements de la culture liturgique. En tant que chrétienne, elle s’est rendue en pèlerinage en Palestine et a recueilli les Saintes reliques de la Passion du Christ. Elle a accompagné la construction de Basiliques pour protéger les différents lieux saints.
La mère de Constantin, Hélène, s’est elle, rendue en pèlerinage en Palestine
et a recueilli les Saintes reliques de la Passion du Christ. Elle a accompagné
la construction de Basiliques pour protéger les lieux saints.
(Image : Wikimedia / Cima da Conegliano / Domaine public)
Constantin le bâtisseur et le réformateur
L’apaisement des tensions religieuses suite à la fin de la persécution, ainsi que l’unification de l’Empire romain ont conduit à de nombreuses réformes. Elles ont touché le monde économique, financier, administratif et la gouvernance de l’empire. En tout premier lieu le commerce et le monde économique ont été stabilisés par l’introduction d’une monnaie forte, le solidus ou solidus aureus et un système monétaire qui perdurera jusqu’au XIe siècle.
Le commerce et le monde économique ont été stabilisés par l’introduction d’une monnaie forte, le solidus ou solidus aureus et un système monétaire qui a perduré jusqu’au XIe siècle. (Image : Wikimedia / Cabinet des Médailles / Domaine public)
En 324, après sa victoire sur Licinius à Chrysopolis (l’actuelle Turquie), et la réunification de l’empire, un symbole fort a été lancé avec la création d’une nouvelle capitale : Constantinople, érigée à la place de l’ancienne citée grecque, Byzance. Cette ville, construite sur le modèle de la ville de Rome, est rapidement devenue une ville majoritairement chrétienne.
Dans la foulée, de manière à maintenir son règne d’empereur absolu, l’administration a été centralisée. C’est tout un nouveau monde administratif, législatif et sénatorial qui a été mis en place et a conforté le fonctionnement d’un empire romain florissant et dynamique.
Ces réformes ont fait de Constantin Ier un grand réformateur, un peu comme certains empereurs chinois des dynasties Han ou Tang.
Constantin et sa mère Hélène représentés en icône orthodoxe bulgare.
(Image : Wikimedia / Brosen / CC BY-SA)
La conversion de Constantin sur son lit de mort a beaucoup questionné le monde chrétien. L’authenticité de son appartenance au monde chrétien a fait aussi débat, voire a été jugée comme opportuniste, venant d’un empereur stratège. Pour autant il est incontournable que la position contre la persécution d’une croyance a permis à un empire de renaître de ses cendres.
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