Suite à la pandémie du Covid-19, l’Inde est en confinement depuis plus de deux mois. Bien que cette mesure ait permis à l’un des pays les plus peuplés du monde de maintenir l’épidémie sous contrôle raisonnable, les conséquences économiques ont été lourdes, notamment pour les millions d’employés domestiques. Nombre d’entre eux se retrouvent aujourd’hui privés d’emploi et de revenus, luttant pour assurer leurs repas quotidiens.
Laissés sans emploi
On estime à 50 millions le nombre d’employés domestiques en Inde, dont la plupart sont des femmes. Nombre d’entre elles ont quitté les régions rurales pour travailler en ville et pour assurer les revenus à leurs familles. Le coût de la vie dans les villes étant plus élevé que celui dans les zones rurales, se retrouver sans revenu rend la vie extrêmement difficile.
En raison de l’insuffisance de leurs revenus, les travailleurs n’ont en général pas assez d’économies pour faire face à la situation. De même, Les employés domestiques ne peuvent obtenir de prêts auprès des banques ou des institutions financières, car ils répondent rarement aux exigences de ces organismes en matière de crédit. Le coût de la vie en ville étant plus élevé que celui des zones rurales, la seule option pour ces personnes reste de faire appel à des prêteurs locaux, avec des taux d’intérêt plus élevés. Plus longtemps ces personnes restent sans revenus, moins elles ont de chances de pouvoir rembourser les prêts et plus les intérêts qu’elles doivent payer sont élevés.
En raison de l’insuffisance de leurs revenus, les travailleurs n’ont en général pas d’économies qui pourraient servir de filet de protection. (Image : Capture d’écran / YouTube)
Les employés qui continuent de travailler sont confrontés à une foule de problèmes. Nombre d’entre eux voient leurs salaires réduits, les employeurs affirmant qu’ils ne peuvent pas faire autrement. Comme les services de transport sont restreints en raison de la fermeture des usines, ces travailleurs s’épuisent à parcourir de longues distances à pied pour se rendre chez leur employeur ou finissent par dépenser une somme exorbitante en transport. Les employés domestiques font également face à l’humiliation d’être considérés comme des porteurs potentiels du virus, comme ils viennent de régions pauvres où la distanciation sociale n’est pas toujours possible. Même après la levée des restrictions de Covid-19, les employeurs pourront décider de ne pas les reprendre pendant un certain temps, afin d’éviter tout risque d’infection.
Meenakshi Gupta Jain, chef de Helper4U, une plateforme en ligne qui met en relation les travailleurs domestiques et les employeurs, estime qu’une telle ligne de pensée est déraisonnable car beaucoup de ces employeurs autorisent déjà les vendeurs de légumes et les éboueurs à venir chez eux. Il n’est donc pas nécessaire d’être excessivement prudent à l’égard des travailleurs domestiques. « La solution est de leur donner des masques et du désinfectant pour les mains ainsi que de vêtements qu’ils peuvent porter lorsqu’ils sont chez vous. Vous prenez toutes les précautions nécessaires. Mais il est temps de les laisser revenir », a-t-elle déclaré à la BBC. Même après que les employés domestiques auront repris leur travail, le remboursement des dettes qu’ils ont accumulées pendant la période de fermeture sera longtemps pour eux une lourde charge.
Selon l’Organisation internationale du Travail (OIT), les mesures de confinement vont aggraver la pauvreté et les vulnérabilités parmi les deux milliards de travailleurs de l’économie informelle à travers le monde.
Quant aux 67 millions de travailleurs domestiques dans le monde, dont 75% sont des travailleurs informels, le chômage est devenu aussi dangereux que le virus lui-même. Beaucoup d’entre eux n’ont pas pu travailler, que ce soit à la demande de leur employeur ou en application du confinement. Ceux qui continuent de se rendre au travail sont confrontés à un risque élevé de contagion comme ils s’occupent de familles à leur domicile privé. Pour les 11 millions d’employés domestiques migrants, la situation est encore pire selon un rapport de ONU Info, daté de 07/05/2020.
La situation aux Etats-Unis
Les conditions de travail des employés domestiques aux États-Unis ne sont pas très différentes de celles des travailleurs indiens. Il y a près de 2,2 millions d’employés domestiques aux États-Unis, dont 91,5 % sont des femmes. Selon les données de la National Domestic Workers Alliance (NDWA), plus de la moitié des travailleurs interrogés ont révélé qu’ils ne sont pas retournés au travail depuis le 30 mars. Beaucoup d’entre eux doutent également que leurs employeurs les reprennent lorsque la pandémie prendra fin.
Les conditions de travail des employés domestiques aux États-Unis ne sont pas très différentes de celles de l’Inde. (Image : Capture d’écran / YouTube)
Comme le risque de pauvreté est trois fois plus élevé pour les employés domestiques que pour les autres travailleurs, la perte de l’emploi est également un coup dur pour leur famille. Une suggestion a été faite en faveur d’une déclaration nationale pour les droits des employés domestiques, qui s’étendrait aux salaires de base et à d’autres protections pour ces travailleurs, y compris les protections en matière de soins de santé. Certains ont proposé de créer un fonds pour aider ces travailleurs dans les moments critiques, comme la situation actuelle de Covid-19. Neuf États aux Etats-Unis ont déjà adopté la déclaration pour les droits des employés domestiques.
Traduit par Fetty Adler
Version en anglais : Virus Impact: Indian Domestic Workers Struggling to Survive
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